L’Université des enfants s’envole pour Madagascar

Au large du continent africain, à 8 762 km de Mons, bercée par les vagues de l’océan Indien, l’Université des enfants a posé sa malle aux trésors pédagogiques entre baobabs et lagons turquoise, dans la ville de Tuléar, chez les pêcheurs Vezo. Bienvenue en terre rouge, sur l’ile de Madagascar.

De Mons à Madagascar

L’Université des enfants (UDE) ne date pas d’hier ! Le concept, né en 2002 à Vienne en Autriche, vise à offrir des ateliers ludiques, animés par des universitaires et adaptés aux enfants afin de satisfaire leur légendaire soif de savoir et leur curiosité naturelle et de rendre la science plus accessible. Depuis, la Suisse, le Canada… et la Belgique ont emboité le pas, avec leurs propres programmes, comme en France avec « Les Savanturieurs ».

En Belgique francophone, l’Université des enfants a été lancée en 2017 par l’ULB Engagée. De Bruxelles à Charleroi, de Mons à Madagascar, elle en aura parcouru… des kilomètres ! Et loin d’être essouflée, elle nous offre un avenir prometteur grâce, notamment, à la détermination de l’UMONS et de ses étudiants de master en biologie. Chaque année depuis 2021, ils partent étudier les récifs coralliens – réputés pour leur incroyable biodiversité et leur richesse rare en espèces marines – et, surtout, animer des activités de vulgarisation scientifique auprès des enfants malgaches !

Apnée, aquaculture… et vulgarisation

Retiens bien ton souffle : c’est de la BOMB, bébé ! Le laboratoire de Biologie des Organismes Marins et Biomimétisme de l’UMONS emmène désormais chaque année ses étudiants à la station biologique de Belaza à la découverte des merveilles sous-marines, à travers quatre modules : les techniques de plongée/apnée et les bonnes pratiques en mer, la biodiversité des récifs coralliens et des herbiers marins, l’aquaculture villageoise de concombres de mer, algues et coraux et – point d’orgue du stage – la vulgarisation scientifique.

Parce qu’à Madagascar, la communication scientifique, c’est encore une denrée rare. Apprendre en s’amusant ne fait pas vraiment partie des habitudes scolaires du pays (les cours y sont encore souvent récités à l’ancienne, quoi). « Alors, quand les étudiants de master débarquent avec leurs activités ludiques, leurs histoires de poissons et autres crevettes (leur lot de fun facts aussi !) ainsi que leurs animations pédagogiques, autant dire que les enfants adorent ! », comme l’explique Alexia Lourtie, docteure en biologie, spécialisée en biologie marine et écologie chimique, et médiatrice scientifique (MUMONS), présente sur place pour encadrer le stage et coordonner l’Université des enfants à Madagascar (alias UDEMA).

Une crevette-mante sans pitié sur le récif !

Cette année encore, le stage en biologie marine et les activités développées pour les enfants ont permis de consolider des liens, notamment avec plusieurs ONG locales comme l’ONG Bel Avenir, des représentants du ministère de l’Éducation, mais aussi des membres de l’Université de Tuléar, notamment l’Institut Halieutique et des Sciences Marines. Et parmi eux, une belle promesse d’avenir : Anitah Benah, qui pourrait bien devenir la future coordinatrice de l’UDEMA.

Mais c’est aussi dans le cadre du Forum des Jeunes Africains sur l’Économie Bleue (FOJAEB), organisé par le Bénin, qu’un nouveau projet a vu le jour : un ciné-sciences autour du documentaire Océans, qui questionne l’empreinte que l’humain laisse sur la vie sauvage. Ni une ni deux, l’évènement est mis sur pied, et voilà que 152 petits curieux se sont rassemblés devant ce film de grand intérêt, qui pose de vraies questions sur la préservation des ressources naturelles. Alexia y est alors responsable de la médiation pour répondre aux questions des enfants.

« Le film était long, il faisait chaud et humide, les conditions étaient assez peu propices aux échanges… et pourtant, les enfants étaient hyper motivés, super studieux, ils notaient toutes leurs petites questions ! Ils sont adorables, c’est impressionnant… leur soif d’apprendre est belle à voir », raconte Alexia, chargée de projet de l’UDEMA. « Ce qui est d’autant plus chouette, c’est qu’ils ont sous leurs yeux les espèces vues dans le film. Pour preuve, la crevette-mante (NDLR : une tueuse redoutable) se voit couramment sur leur récif, mais ils l’ignoraient. Ils redécouvrent leur propre environnement, et ça, c’est vraiment super ! »

Des crabes, des marées et des étoiles de mer… plein les yeux !

La biodiversité est au cœur des activités de vulgarisation scientifique développées par l’Université des enfants à Madagascar. À titre d’exemple, lors des deux premières éditions, les enfants sont partis collecter des organismes sur l’estran (là où la marée monte et descend) pour chercher dans le sable toutes les petites bestioles qui pensaient être bien cachées. Mais c’était sans compter sur des petites mains habiles qui les ont débusquées pour les identifier, décrire et classifier, mais aussi découvrir leurs fun facts secrets.

Et aussi au programme des petits scientifiques en herbe, quelques activités amusantes autour de la poussée d’Archimède et la dynamique des fluides – effet waouh garanti avec une simple bouteille et un petit bouchon emprisonné… Un vrai tour de magie en un tour de main !

Cette année, les enfants se sont davantage intéressés aux relations entre les espèces. Qui mange qui ? Comment une espèce s’adapte à son milieu ? À quoi ressemblent ces adaptations ? Et quels sont les critères qui permettent la classification du vivant, d’abord ? Et puis il y a eu la navigation sans boussole, ni GPS… Comment faisaient les ancêtres pour naviguer autrefois ? Oiseaux, étoiles, courants marins… les enfants ont appris à lire les marées, et aussi pourquoi le vent souffle souvent dans le même sens. 

Et Alexia d’ajouter : « On partait toujours des choses qu’ils connaissaient pour expliquer la science qui se cache derrière. Ça a super bien fonctionné : c’est parti en débat, c’était trop cool ! Et ce qui était vraiment chouette, c’est que cette activité touchait à leurs connaissances profondes. Du vécu malgache quoi ! »

Et comme le souligne Guillaume Caulier, biologiste marin, conseiller à la coopération à l’UMONS et également coordinateur du stage, l’équipe montoise de l’Université des enfants avait même prévu dans leurs bagages les fiches de l’Université en vadrouille.

« Les fiches du livre-coffret ont été distribuées aux enfants en fin d’activité pour qu’ils puissent garder un petit support en français. Il y a même la volonté de le traduire en malgache par Anitah, la coordinatrice pressentie pour l’UDEMA. »

L’idée étant de pérenniser les activités de l’Université des enfants sur le territoire malgache tout au long de l’année, et non une seule fois par an. « On compte même mettre en place des formations de vulgarisation scientifique pour permettre aux équipes locales de venir en Belgique et de faire tourner l’UDEMA sur le long terme. » Il y a d’ailleurs déjà eu, sur place, une conférence sur la vulgarisation scientifique dans le cadre de l’UDEMA, rassemblant pas moins de 84 participants, pour être tout à fait précis !

Au total, une cinquantaine d’enfants ont participé aux ateliers proposés et reçu ces fiches ludiques et scientifiques pour mieux comprendre : Tu veux explorer le monde et devenir un véritable naturaliste comme Darwin ? Pourquoi sommes-nous des poussières d’étoiles ? Qu’est-ce que la guerre ? Comment résoudre un conflit ?…

« Ce n’est pas qu’il n’y avait pas plus d’intéressés – que du contraire ! – mais on a dû fixer une jauge maximale à 50 enfants pour assurer des animations vulgarisées de qualité. Après, les directeurs d’écoles où on est allés nous ont demandé quand on revenait pour refaire ce genre d’activités… Ils ont super envie que ça continue ! Donc, oui, on pourrait toucher encore bien plus de monde ! » surenchérit Alexia.

C’est donc peu de dire, que l’Université des enfants à Madagascar a encore un bel avenir devant elle 😊 Notamment avec la création prochaine de l’Espace des Savoirs pour entamer une nouvelle phase de son développement. Plus d’infos à ce sujet ici.