Marcel Delmotte et le surréalisme

Dans ses réserves, l’UMONS possède un tableau de l’artiste Marcel Delmotte daté d’une époque où le surréalisme foisonne dans nos régions. 

 

Le surréalisme 

C’est en France, dans un contexte d’après-guerre où un vent de révolte gronde, qu’apparait le surréalisme. Inspiré par le mouvement dada, il se développe d’abord en littérature grâce au célèbre André Breton qui publie en 1924 le Manifeste du Surréalisme dans lequel il le définit et y présente ses grands principes.  

Le terme surréalisme rend d’ailleurs hommage à Guillaume Apollinaire qui l’avait inventé en 1917. La littérature et l’art ambiants sont alors remis en question et une nouvelle manière de les concevoir émerge. Rêve, onirisme, imagination, absurde, désir, inconscient, mystérieux, choquant, etc., deviennent des maitres-mots dans son expression artistique. L’artiste souhaite explorer et exprimer librement son inconscient afin de renouer avec son intériorité en se défaisant de sa conscience et de la raison – un lâcher-prise total, dépourvu de censure. 

Le surréalisme apparait en Belgique dans les années 20, d’abord à Bruxelles, puis 10 ans plus tard, dans le Hainaut. Il s’y développe principalement autour d’Achille Chavée et Fernand Dumont, d’abord dans le groupe Rupture (1934), ensuite dans le Groupe surréaliste du Hainaut (1939). Cependant, malgré l’existence de ces deux foyers principaux, une quantité de groupes surréalistes exprimant différemment ce courant émergent, animés par des divergences d’opinions et d’expressions.  

 

Marcel Delmotte, l’artisan devenu artiste 

Marcel Delmotte voit le jour le 24 avril 1901 à Charleroi. D’abord peintre en bâtiment, spécialisé dans la création de faux marbre, cet artisan passionné d’art, ne tarde pas à s’initier en autodidacte au dessin, à la peinture et à la sculpture. Il ne suivra que quelques cours en tant qu’élève libre de Léon Van den Houten (1874-1944) à Charleroi durant la Grande Guerre. Il observe, s’imprègne et s’inspire d’autres courants artistiques contemporains ou non, mais aussi de la nature et de l’héritage des grands maitres de la Renaissance. De plus, il est témoin de l’émergence du surréalisme dans nos régions. 

Son art, d’abord qualifié de réaliste, se teinte d’expressionnisme et d’un surréalisme personnel. Ses sources d’inspiration sont entre autres la Bible, la mythologie, la nature et la Divine Comédie de Dante. Il aborde des thématiques telles que la beauté féminine (beaucoup de nus), l’homme face à la précarité et le destin de l’humanité. On observe dans son œuvre des arrière-plans abstraits, organiques, parfois irréels, voire inhospitaliers. Ses paysages sont lunaires et visionnaires. Il y règne également une atmosphère onirique, fantastique et mystérieuse. À partir de 1948 et jusqu’à la fin de sa vie, le « fantastique » anime son travail. Enfin, Marcel Delmotte s’est toujours défendu d’appartenir à un courant en particulier et se considère plus comme « un classique de son temps » exprimant audace et intuition, abandonnant la raison. 

Il décède en 1984 à Mont-sur-Marchienne. Son art et sa forte personnalité ont marqué la peinture belge.  

 

Marcel Delmotte dans les réserves du MUMONS 

Cette huile sur bois, datée de 1934, au titre inconnu, nous rappelle les paysages de Delmotte qualifiés de surréalistes.  

Cette œuvre, nébuleuse après un premier coup d’œil, est en réalité truffée d’une multitude de symboles si on prend le temps de l’observer. Elle pourrait être analysée et interprétée de 1000 façons différentes selon celui qui la regarde.  

On peut y déceler une très probable inspiration de la Divine Comédie de Dante. Des femmes nues ondulent telles des flammes dans la nuit de l’Enfer (ill. 2). Des âmes, sur la rive de l’Achéron, sont probablement dans l’attente de Charon. Cette thématique peut être liée, ou non, à celle de la religion catholique avec la représentation du Christ crucifié (ill. 5) et d’un ange tenant une trompette, mais également à la mythologie grecque avec cette figure reposant sur sa lyre (ill. 4), tel Apollon ?  

Et vous, que voyez-vous ? 

 

Bibliographie  

  • Canonne, X., Le Surréalisme en Belgique, Anvers, 2006. 
  • Delmotte, M. dans Piron, P., Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, vol. 1, Bruxelles, 2003. 
  • Lancz Gallery, en ligne : https://www.lanczgallery.be/Artistes-175-Marcel_Delmotte  
  • Waldemar, G., Le monde imaginaire de Marcel Delmotte, Paris, 1969.